Politique intérieure (autres dossiers)

Les cantons sont souvent concernés par les dossiers de politique intérieure : beaucoup de projets relèvent partiellement voire entièrement de leurs domaines de compétence ou ont des conséquences concrètes au niveau cantonal. Pour faire entendre leur voix et ancrer leur collaboration, les cantons peuvent agir au sein des différentes conférences. Si les conférences des directeurs traitent des thèmes qui leurs sont propres, la CdC concentre ses travaux sur les dossiers d’ordre institutionnel, de stratégie politique ou transversaux.

Les gouvernements cantonaux suivent ainsi de près plusieurs projets. La CdC s’engage parallèlement dans des espaces où collaborent les différents échelons de l’État, comme la Conférence tripartite ou le Projet de territoire Suisse.

Dossiers actuels

Exposition nationale

1883 à Zurich, 1896 à Genève, 1914 à Berne, 1939 à Zurich, 1964 à Lausanne, 2002 dans la région des Trois-Lacs : génération après génération, les expositions nationales ont marqué l’histoire de l’État fédéral. Les yeux sont désormais tournés vers la prochaine édition, qui pourrait se tenir à l’horizon 2030. Plusieurs initiatives ont été lancées. La Confédération et les cantons sont impliqués dans l’organisation d’une telle manifestation qui peut servir de trait d’union entre les habitants, les cultures et les langues du pays, ouvrir des perspectives d’avenir et dont l’ensemble du pays peut bénéficier durablement.

Dans une position commune adoptée en juin 2022, le Conseil fédéral et la CdC ont salué l'idée d’une nouvelle exposition et ont brossé les grandes lignes des conditions-cadres. Si la Confédération et les cantons sont disposés à accompagner le processus de planification, ils ne joueront pas le rôle d’initiateurs. La conduite et la responsabilité du projet doivent être assumées de bout en bout par l’entité qui en a la charge. Un éventuel soutien financier doit être déterminé par les parlements concernés.

Le Conseil fédéral a précisé ses vues en novembre 2023 dans son rapport sur les conditions-cadre d’une exposition nationale. En raison de la situation financière tendue de la Confédération et des mesures d’économie, il entend se prononcer au plus tôt en 2028 quant à un éventuel engagement financier.

Financement uniforme des prestations de santé ambulatoires et stationnaires

La Confédération et les cantons souhaitent augmenter l’efficacité et l’efficience de la prise en charge des patient·es afin de maîtriser la hausse des coûts de la santé. Le Parlement adopté en décembre 2023 une modification de la loi fédérale sur l’assurance maladie (LAMal). Basée sur l’initiative parlementaire Humbel (09.528), elle prévoit un financement uniforme des prestations ambulatoires et des prestations avec hospitalisation. Répondant à une exigence des cantons, la réforme englobe également les prestations de soins des organismes d’aide et soins à domicile et des établissements médico-sociaux (EMS).

Actuellement, les cantons prennent en charge au moins 55 % des coûts lorsqu’il s’agit du secteur stationnaire alors que le secteur ambulatoire relève uniquement des assureurs. Par ailleurs, trois sources sont prévues pour financer les prestations de soins : l’assurance-maladie verse une contribution fixe qui est complétée par une contribution limitée des assuré·es, le financement résiduel incombant aux cantons. À l’avenir, la même clé de financement entre les caisses-maladies et les cantons prévaudra pour toutes les prestations LAMal.

Cette réforme d’envergure répartit les coûts de la santé de manière équitable entre assuré·es et contribuables. Elle permettra de lever plusieurs freins actuels à la maîtrise des coûts. Elle favorisera la coopération entre les fournisseurs de prestations tout au long de la chaîne de traitement (soins intégrés) ainsi que le transfert des prestations hospitalières vers l’ambulatoire.

La modification de la LAMal est le fruit de longs travaux parlementaires. Il s’agissait de trouver une solution viable et équilibrée. Tous les acteurs pertinents ont fait des concessions. Un référendum ayant été déposé, une votation populaire sera organisée le 24 novembre 2024. Les gouvernements cantonaux appellent à soutenir la réforme. Ils ont pris position le 20 septembre 2024. 

Fiscalité des entreprises

Une déclaration commune en vue d’une réforme de la taxation des multinationales a été adoptée par plus de 130 pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ce document prévoit notamment la mise en place d’un impôt minimal de 15 %. La réforme aura de fortes répercussions sur la Suisse, pays à la fiscalité attractive et siège de nombreuses multinationales.

L’imposition minimale place la Confédération et les cantons devant un nouveau défi après celui de la réforme de l’imposition des entreprises (voir ci-dessous). Les Chambres fédérales ont adopté en décembre 2022 une modification de la Constitution qui sert de base légale à une ordonnance provisoire permettant de mettre en œuvre cette réforme dès le 1er janvier 2024. Une loi prendra le relais selon la procédure ordinaire.

L’arrêté fédéral sur une imposition particulière des grands groupes d’entreprises prévoit une imposition minimale de 15 % pour les multinationales dont le chiffre annuel atteint au moins 750 millions d’euros. Cet objectif sera atteint, si nécessaire, grâce à un impôt complémentaire, dont le produit sera réparti entre les cantons (75 %) et la Confédération (25 %). Les cantons reçoivent ainsi les moyens nécessaires, issus des recettes fiscales et de la péréquation financière, pour prendre leurs dispositions afin de rester attractifs pour les grands groupes d’entreprises. Ils connaissent au mieux les besoins des entreprises implantées sur leur territoire et peuvent donc prendre des mesures calibrées.

Lors de l’Assemblée plénière du 24 mars 2023, les gouvernements cantonaux se sont prononcés en faveur de l’arrêté fédéral, accepté par le peuple et les cantons le 18 juin.

Position

RFFA

Acceptée le 19 mai 2019 par le peuple et en vigueur depuis janvier 2020, la loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA), soutenue par les cantons, a fait une croix sur les régimes fiscaux spéciaux accordés aux entreprises opérant principalement sur le plan international. Ces réglementations n’étaient plus en conformité avec les exigences de la communauté internationale.

Une controverse a notamment opposé la Suisse et l’Union européenne. L’UE critiquait certains régimes d’imposition cantonaux, estimant qu’ils faussaient le libre jeu de la concurrence en taxant parfois différemment les revenus d’entreprises nationales et ceux de sociétés étrangères. La Suisse a ajusté sa pratique fiscale aux standards internationaux de l’OCDE, au développement desquels elle participe par ailleurs.

Désormais toutes les entreprises sont soumises aux mêmes règles d’imposition. Pour que la Suisse reste une place économique attrayante, de nouveaux instruments sont prévus. Les cantons peuvent en outre adapter leur taux d’imposition des bénéfices, en fonction de leurs besoins. La Confédération leur accorde pour ce faire une part plus importante du produit de l’impôt fédéral direct.

Mesures d’allégement budgétaire de la Confédération

Les finances fédérales étant grevées par de nouvelles dépenses dont le financement n’est pas assuré, la Confédération doit faire des économies. S’il est dans l’intérêt de l’État tout entier de préserver l’équilibre budgétaire, cela ne saurait passer par un surcroît de charges pour les cantons. Ces derniers sont surtout concernés par la réduction prévue de la part cantonale à l’impôt fédéral direct (pour financer de nouvelles subventions des crèches) et par celle de l’apport au fonds d’infrastructure ferroviaire.

Les cantons étant tenus dans de nombreux domaines à assurer un certain niveau de prestations, les mesures d’allègement risquent de leur occasionner un surcroît de charges direct ou indirect. Cela illustre en outre à quel point les financements conjoints entre la Confédération et les cantons peuvent poser problème. En revanche, une répartition claire des tâches renforce la responsabilité budgétaire et prévient les transferts de charges. Les cantons proposent donc de relancer dès que possible le projet « Répartition des tâches II ».

Conférence tripartite

Plate-forme politique de la Confédération, des cantons, des villes et des communes, la Conférence tripartite (CT) encourage la coopération entre les échelons de l’État et entre les espaces urbains et ruraux. Fondée le 20 février 2001 par le Conseil fédéral, la Conférence des gouvernement cantonaux (CdC), l’Union des villes suisses (UVS) et par l’Association des Communes Suisses (ACS) sous le nom de Conférence tripartite sur les agglomérations, elle a été renommée Conférence tripartite en 2017, lorsque les espaces ruraux lui ont été associés.

La CT traite de sujets liés au développement territorial qui relèvent des trois échelons institutionnels. Si elle s’intéresse à différents sujets liés à cette thématique, elle participe aussi à la mise en place d’une politique commune des agglomérations, des espaces ruraux et des régions de montagne. Ce faisant, elle contribue à un développement cohérent, en adéquation avec le Projet de territoire Suisse et en tenant compte des besoins spécifiques des différents espaces. Les travaux de la CT se concentrent actuellement sur deux thèmes : « Développer la biodiversité et la qualité paysagère dans les agglomérations » et le dialogue tripartite « Densifier avec qualité » auquel participent des acteurs privés. Les priorités de la conférence sont définies dans un programme de travail pluriannuel.

La CT repose légalement sur une convention signée par le Conseil fédéral, la CdC, l’ACS et l’UVS. Elle siège deux fois par an au moins. Elle institue des groupes de travail et a recours à des spécialistes externes. La présidence et le secrétariat sont assurés par la CdC.

Projet de territoire Suisse

En Suisse, le sol est une ressource limitée. Avec la croissance démographique et économique, les besoins en espace augmentent, que ce soit pour l’habitat, le travail, les loisirs ou pour les déplacements. Les exigences de la population changent parallèlement. Cette évolution se traduit par une utilisation excessive des ressources naturelles, à un appauvrissement de la qualité du tissu bâti et des espaces de détente ainsi qu’à une hausse des coûts d’exploitation et d’entretien des infrastructures.

Adopté en 2012, le Projet de territoire Suisse doit servir de cadre d’orientation et d’aide à la décision pour les activités à incidence territoriale aux échelons fédéral, cantonal et communal. En plus de définir des objectifs et des stratégies, il contient trois cartes qui illustrent la manière d’utiliser durablement le sol ainsi que d’autres ressources et d’exploiter les qualités de la Suisse. Douze territoires d’action suprarégionaux ont été délimités : quatre reposant sur de grands centres urbains (Zurich, Bâle, bassin lémanique, région de la ville fédérale), cinq reposant sur un réseau de villes moyennes et petites (Lucerne, Città Ticino, Arc jurassien, Aareland, Nord-Est de la Suisse), ainsi que trois territoires d’action de l’espace alpin (Gothard, Alpes occidentales, Alpes orientales).

Entretemps, la situation a beaucoup évolué. Par exemple, les conséquences du changement climatique et l’approvisionnement énergétique ont énormément gagné en importance. Une mise à jour s’impose pour donner toute leur place aux thèmes qui n’ont pas été suffisamment pris en compte. L’actualisation est en cours et devra être terminée en 2025. L’objectif est d’élaborer un projet présentant la Suisse telle qu’elle pourrait être en 2050.

Le Projet de territoire Suisse n’est pas contraignant d’un point de vue juridique. Il en appelle à une approche volontaire, à un sens des responsabilités et à une collaboration qui soient capables de gommer les frontières géographiques, politiques et institutionnelles. Il a été mis sur pied à l’initiative du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC), de la CdC, de la Conférence suisse des directeurs cantonaux des travaux publics, de l’aménagement du territoire et de l’environnement (DTAP), de l’Union des villes suisses (UVS) et de l’Association des Communes Suisses (ACS).

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