Les cantons sont souvent concernés par les dossiers traités au niveau fédéral : beaucoup de projets relèvent partiellement voire entièrement de leurs domaines de compétence ou ont des conséquences concrètes au niveau cantonal. Pour faire entendre leur voix et renforcer leur collaboration, les cantons s’engagent au sein des différentes conférences. Si les conférences des directeurs traitent des thèmes qui leurs sont propres, la CdC concentre ses travaux sur les dossiers d’ordre institutionnel, de stratégie politique ou transversaux. Plusieurs dossiers d’actualité font l’objet d'un suivi.

Programme d’allégement 2027

La volonté de la Confédération d’équilibrer son budget est tout à fait compréhensible aux yeux des gouvernements cantonaux. Des finances fédérales saines sont dans l’intérêt de toute la Suisse. En revanche, les cantons jugent extrêmement insatisfaisante la procédure d’élaboration du programme d’allégement 2027. Le 5 septembre 2024, le groupe d’experts chargé du réexamen des tâches et des subventions de la Confédération a publié son rapport. Les cantons ont alors réagi en dénonçant un transfert unilatéral de charges à leurs dépens : ce ne sont pas de réelles économies et les cantons s’y opposeront.

Les gouvernements cantonaux ont rappelé leurs griefs dans la foulée de l’Assemblée plénière du 20 septembre 2024. Ils ont appelé le Conseil fédéral à se pencher une nouvelle fois sur le programme d’allégement avec toute l’attention nécessaire et en associant les cantons avant de le mettre en consultation.

Cette demande est restée lettre morte. Le 29 février, le Conseil fédéral a lancé la consultation sur le programme d’allégement 2027. Les gouvernements cantonaux ont pris position le 14 mars. Les cantons ont répété ne pas comprendre pourquoi ils n’ont pas été associés au processus et ont réitéré leur appel au Conseil fédéral pour qu’il coordonne les mesures d’économies avec eux.

Service national des adresses

Beaucoup de procédures administratives nécessitent que les autorités compétentes prennent contact par écrit avec les personnes concernées. À l’heure actuelle, aucun système national ne permet aux autorités suisses de retrouver le domicile ou l’adresse des habitants au-delà des frontières cantonales. 

La valeur ajoutée d’un service national des adresses est évidente : disposer des données à l’échelle de tout le territoire permettra d’améliorer l’efficacité des services. Dans le cas particulier des déménagements avec changement de canton, un tel service simplifiera les démarches pour la prise de contact et évitera des procédures trop longues, de nombreux retours de courriers et le blocage des processus, ce qui se traduira par des économies pour les administrations. La population sera elle aussi gagnante.

La nécessité d’agir a été reconnue par le Conseil fédéral et les gouvernements cantonaux dans le cadre de l’Administration numérique suisse. La mise en œuvre du service national des adresses a été définie comme mesure prioritaire. Le Conseil fédéral a présenté un projet de loi au Parlement en mai 2023. Le Conseil des États l’a clairement soutenu (40 voix contre 4) en décembre 2023. Toutefois, en février 2024, le Conseil national s’est prononcé par 116 voix contre 71 pour un renvoi au Conseil fédéral. Un des motifs de sa décision était l’absence de base légale constitutionnelle. En septembre 2024, le Conseil des États a maintenu son soutien à la loi et refusé le renvoi par 31 voix contre 11. En mars 2025, le Conseil national a finalement rejeté la proposition de renvoi par 99 voix contre 96.

Les cantons veulent dynamiser la transformation numérique de l’administration. Le service national des adresses est un élément clé. Un renvoi de la loi au Conseil fédéral aurait reporté sa réalisation à une date indéterminée. Les gouvernements cantonaux ont donc souligné leur soutien au projet lors de l’Assemblée plénière du 21 juin 2024.

La loi sur le service national des adresses s’inscrit dans une démarche fédérale : le projet ne requiert pas la création d’un nouveau registre ou d’une nouvelle compétence fédérale. Les données cantonales et communales des registres des habitants seront simplement mises en réseau et rendues accessibles, sans être modifiées, à tous les services administratifs titulaires d’une autorisation d’accès.

La propriété des données et leur traitement restent de la compétence des services des habitants des communes et des cantons. Les cantons estiment que cette approche est clairement préférable à celle d’un registre fédéral central qui impliquerait le transfert à la Confédération de la propriété des données. La mise en œuvre du service national des adresses peut s’effectuer en se fondant sur les bases légales existantes, de sorte qu’il puisse déployer ses effets au plus vite.

Intelligence artificielle

Le Conseil fédéral entend réglementer l’intelligence artificielle (IA) afin de pouvoir exploiter son potentiel pour la place économique et d’innovation suisse, tout en limitant les risques pour la société notamment en matière de droits fondamentaux. Mi-février, il a décidé de ratifier la convention récemment adoptée par le Conseil de l’Europe. D’ici fin 2026, le Conseil fédéral examinera les modifications nécessaires dans le droit national et les soumettra à consultation. Les cantons doivent être associés à l’élaboration de cette réglementation. 

En vertu de l’approche suivie par le Conseil fédéral, la nouvelle législation concernera en premier lieu les acteurs étatiques. Les modifications de loi seront aussi sectorielles que possible, une réglementation générale se limitant aux domaines centraux relevant des droits fondamentaux comme la protection des données. Sont en outre envisagées des mesures juridiquement non contraignantes, tels que des accords d’auto-déclaration sectoriels. 

La ratification de la convention du Conseil de l’Europe concerne aussi les cantons. Aussi se doivent-ils d’identifier dans quels domaines relevant de leur compétence des modifications légales seront nécessaires.

Fiscalité des entreprises

Une déclaration commune en vue d’une réforme de la taxation des multinationales a été adoptée par plus de 130 pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ce document prévoit notamment la mise en place d’un impôt minimal de 15 %. La réforme aura de fortes répercussions sur la Suisse, pays à la fiscalité attractive et siège de nombreuses multinationales.

L’imposition minimale place la Confédération et les cantons devant un nouveau défi après celui de la réforme de l’imposition des entreprises (voir ci-dessous). Les Chambres fédérales ont adopté en décembre 2022 une modification de la Constitution qui sert de base légale à une ordonnance provisoire permettant de mettre en œuvre cette réforme dès le 1er janvier 2024. Une loi prendra le relais selon la procédure ordinaire.

L’arrêté fédéral sur une imposition particulière des grands groupes d’entreprises prévoit une imposition minimale de 15 % pour les multinationales dont le chiffre annuel atteint au moins 750 millions d’euros. Cet objectif sera atteint, si nécessaire, grâce à un impôt complémentaire, dont le produit sera réparti entre les cantons (75 %) et la Confédération (25 %). Les cantons reçoivent ainsi les moyens nécessaires, issus des recettes fiscales et de la péréquation financière, pour prendre leurs dispositions afin de rester attractifs pour les grands groupes d’entreprises. Ils connaissent au mieux les besoins des entreprises implantées sur leur territoire et peuvent donc prendre des mesures calibrées.

Lors de l’Assemblée plénière du 24 mars 2023, les gouvernements cantonaux se sont prononcés en faveur de l’arrêté fédéral, accepté par le peuple et les cantons le 18 juin.

Position

RFFA

Acceptée le 19 mai 2019 par le peuple et en vigueur depuis janvier 2020, la loi fédérale relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA), soutenue par les cantons, a fait une croix sur les régimes fiscaux spéciaux accordés aux entreprises opérant principalement sur le plan international. Ces réglementations n’étaient plus en conformité avec les exigences de la communauté internationale.

Une controverse a notamment opposé la Suisse et l’Union européenne. L’UE critiquait certains régimes d’imposition cantonaux, estimant qu’ils faussaient le libre jeu de la concurrence en taxant parfois différemment les revenus d’entreprises nationales et ceux de sociétés étrangères. La Suisse a ajusté sa pratique fiscale aux standards internationaux de l’OCDE, au développement desquels elle participe par ailleurs.

Désormais toutes les entreprises sont soumises aux mêmes règles d’imposition. Pour que la Suisse reste une place économique attrayante, de nouveaux instruments sont prévus. Les cantons peuvent en outre adapter leur taux d’imposition des bénéfices, en fonction de leurs besoins. La Confédération leur accorde pour ce faire une part plus importante du produit de l’impôt fédéral direct.

Début de page